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« L’IA générative va libérer du temps pour des tâches plus créatives. »

23/10/2023

D’après une étude de McKinsey publiée en juin 2023, l’IA générative pourrait entraîner des gains de productivité importants pour les entreprises du retail, de 1,2 à 2 % de CA annuel supplémentaire dans les années à venir. Son utilisation comporte des risques, mais les acteurs économiques peuvent s’en prémunir. Les explications d’Éric Hazan, directeur associé senior chez McKinsey France.

Beaucoup d’entreprises utilisent déjà des solutions d’intelligence artificielle. Qu’est-ce que l’IA générative va leur apporter de plus ? 

Éric Hazan – Elle marque une nouvelle étape, en offrant au grand public la capacité d’utiliser la technologie pour écrire du texte, composer de la musique et créer de l’art numérique. Son succès a été immédiat, comme l’a montré l’intérêt pour ChatGPT dès son lancement, fin 2022. Les entreprises, qui ont multiplié les annonces de tests ces derniers mois, participent à cet engouement massif. D’après nos travaux, l’IA générative pourrait entraîner des gains de productivité de l’ordre de 2 600 à 4 400 milliards de dollars par an. Avec l’IA générative, nous avons dû avancer toutes nos précédentes estimations sur l’IA d’une décennie !

 

Comment avez-vous évalué ce potentiel économique de l’IA générative dans vos recherches ? 

É. H. – Notre étude comprend trois modèles. Dans un premier temps, nous avons analysé 63 cas d’usage pour lesquels l’IA générative pourrait avoir une valeur ajoutée significative, et nous avons estimé la valeur annuelle potentielle de ces cas d’usage s’ils étaient mis en place dans l’ensemble de l’économie. Le second modèle visait à déterminer les impacts de l’IA générative sur le travail, et nous avons calculé qu’elle pouvait automatiser 70 % des tâches actuelles à plus de 50 %. Enfin, nous avons évalué la temporalité de ces scénarios, en fonction de la vitesse d’adoption des outils d’IA générative : nous avons établi un premier scénario à horizon 2030, un deuxième à long terme à 2060, et un autre, médian, à 2045. 

 

De nombreuses tâches seront automatisées par l’IA générative. Quelles sont les conséquences sur l’organisation des entreprises et la nature du travail ? 

É. H. – L’IA générative accélère le potentiel d’automatisation des métiers de la connaissance : elle peut créer des messages personnalisés adaptés aux préférences des clients, réaliser des ébauches de publicité, de slogans et de description de produits, traduire instantanément des campagnes de mailing en plusieurs langues, etc. Elle garantit aussi l’uniformité du message de la marque. Pour réussir son intégration, les entreprises vont donc devoir consentir des efforts de réorganisation et de formation de leurs collaborateurs, y compris pour les emplois qualifiés. La bonne nouvelle, c’est que l’IA générative devrait libérer du temps pour que les employés, assistés par des logiciels intelligents, se consacrent à des tâches plus créatives et à plus forte valeur ajoutée. Ils apprendront à vivre avec une IA copilote, de la même manière qu’ils ont appris à vivre avec un ordinateur. Les compétences devraient donc être nivelées par le haut. 

 

L’utilisation de l’IA générative ne va pas sans risques : cyberattaques, manipulations, protection de la propriété intellectuelle et des données personnelles… Comment les entreprises peuvent-elles s’en prémunir ? 

É. H. – En effet, ce sont des risques que les entreprises ne doivent pas négliger. D’après nos études, seuls 21 % des cadres dirigeants qui ont adopté l’IA estiment que leurs organisations ont mis en œuvre des politiques sur l’utilisation des technologies d’IA générative par les employés dans leur travail. 32 % seulement disent qu’elles ont mis en place des politiques d’atténuation des inexactitudes (le risque le plus prégnant), et 38 % déclarent avoir instauré des politiques relatives aux risques de cybersécurité (51 % pour l’IA dans son ensemble).

Pour pallier ces risques, les entreprises doivent expliquer leurs décisions et s’assurer que leurs systèmes d’IA sont transparents. Les développeurs et les fournisseurs d’IA doivent également être tenus responsables des conséquences de leurs systèmes. Enfin, toutes les parties prenantes doivent être sensibilisées aux enjeux de l’IA et impliquées dans les discussions, avec la garantie que l’IA est utilisée dans l’intérêt public et reflète les valeurs et les préoccupations de la société.

La bio d'Éric Hazan

Éric Hazan, diplômé d’HEC en 1992, est directeur associé senior chez McKinsey à Paris, expert des questions de marketing stratégique et de l’impact de la transformation numérique sur la consommation et les organisations. 
Il accompagne des acteurs européens des secteurs de la distribution, de la grande consommation et de la technologie. Il a contribué à une étude sur le potentiel économique de l’IA générative sortie en juin 2023.

Crédits : © Adobe Stock

La bio d'Éric Hazan
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