Image

Tristan Daltroff • La créativité fait-elle évoluer les marques ?

11/10/2022

Qui de mieux qu’un directeur de la création pour parler de créativité ? L’exercice n’est pas si simple lorsqu’on fait ce métier depuis de nombreuses années. Tristan Daltroff, pionnier de l’agence publicitaire Buzzman, largement récompensée pour ses campagnes originales et décalées, s’est prêté au jeu avec succès ! Que retient-on ? Pas de bonne recette ni d’école de la créativité mais des mots que l’on connaît tous et auxquels on ne fait pas assez souvent appel, surtout en milieu professionnel. On parle d’intuition, de la puissance de la conversation et de liberté.



frTristan Daltroff
Directeur de création chez Buzzman

Être créatif dans l’univers de la publicité, qui y accorde tellement d’importance tant sur l’image de marque que sur la valeur financière, cela vous donne-t-il une place privilégiée ?

Évidemment, nous sommes choyés et être créatif en agence, c’est le meilleur cadre possible pour moi parce que sinon j’aurais fait partie de la catégorie des artistes et ce n’était pas ce à quoi j’aspirais. Après, je dirais que tout le monde est créatif à son échelle. Pour défendre une campagne, il faut aussi savoir la vendre, les services commerciaux nous accompagnent beaucoup à ce moment-là. Sans compter que les marques aussi sont créatives, elles viennent nous voir pour peaufiner le message mais elles ont des choses à dire et une vision à proposer. Une idée passe de main en main, c’est ce qui lui fait prendre de l’ampleur et qui la rend originale.

La créativité reste un concept assez mystérieux mais pouvez-vous essayer de décrire le mécanisme de production d’une idée ?

Souvent, l’idée se construit de manière empirique, parfois, elle arrive même pendant le brief avec les clients. On part de la signature, du produit, d’une situation ou même du média, cela dépend mais globalement l’idée naît de manière chaotique. En revanche, avec l’expérience, on apprend à jouer avec quelques exercices de style, on acquiert des réflexes et puis, à force, cela devient une gymnastique du cerveau. On cherche des concepts qui sont simples et qui prêtent à rire ou qui fédèrent et génèrent de l’émotion. Notre mission consiste à capter et à transmettre un regard singulier sur une époque, une situation. C’est beaucoup de travail et d’imagination. Je dirais qu’il faut créer dans un cadre mais pas dans une case. C’est-à-dire créer dans la contrainte du brief mais ne pas vouloir faire entrer l’idée dans une matrice parce que bien souvent la case que l’on cherche n’existe pas. C’est le fruit de la puissance du cerveau et de sa capacité à créer de nouvelles connexions, de nouvelles interactions. D’où l’intérêt pour un créatif de travailler en binôme, la plupart du temps avec un concepteur-rédacteur parce que l’échange est essentiel, en réunion, autour d’un café…

Vous diriez que vous êtes les artisans du message de la marque ?  Doit-on parfois s’imposer pour faire passer une idée qui émane de sa subjectivité ?

Oui un peu. Finalement, on met notre sensibilité et notre identité au service d’un message de marque ou pour résoudre un enjeu de communication. On a tous nos références, notre vie, nos associations d’idées que l’on transforme en concept pour forger un discours de marque comme si elles étaient nos mécènes pour que l’on arrive inconsciemment à donner un peu de nous. Elles restent maîtres du jeu bien sûr et ce sont elles qui arbitrent mais, lorsque l’on crée une campagne, on reste notre premier public et on réfléchit à la façon dont on aimerait bien qu’une marque nous parle. On essaye de se mettre à la place des consommateurs et des annonceurs... Parfois, les marques ne prennent pas de risque parce que notre message est trop “coup de poing”, trop provocant. Il y a toute une somme des subjectivités qu’il faut accorder entre elles pour trouver un consensus. Et puis parfois, il existe une petite magie, qu’on appelle l’intuition et qui vient se substituer à la rationalité : de temps en temps c’est trompeur mais quand cela marche, c’est assez beau, voire un peu transcendant.

PARTAGEZ CET ARTICLE

VOUS POURRIEZ ÉGALEMENT AIMER

Abonnez-vous
à notre newsletter
et magazine

Inscription gratuite