Expérience client : quel rôle pour le produit ?

17/03/2016

Les clients ne veulent plus uniquement acheter un produit. En magasin, ils attendent une expérience pédagogique, ludique ou encore émotionnelle, qui les motive à se déplacer. Et dans l’utilisation au quotidien, ils recherchent avant tout une solution qui s’adapte à leur besoin. La propriété n’est plus leur priorité. Etat des lieux et pistes d’avenir.

Quel est aujourd’hui le moteur du marché de la musique ? L’abonnement à des services de streaming comme Deezer, Spotify ou Apple Music. Cette façon de consommer de la musique en illimité, pour 9,99 € par mois, connaît un développement incroyable : + 66 % entre 2014 et 2015 (ZDNet). Dans le même temps, les ventes de CD, ainsi que de MP3, continuent de baisser. En une génération à peine, l’industrie musicale aura basculé d’un modèle fondé sur la vente de produits à un modèle basé sur l’abonnement. Ici désormais, l’expérience prime sur la possession.

Peut-on imaginer une telle révolution dans d’autres secteurs ? Les marques sont, en tout cas, de plus en plus nombreuses à vouloir proposer à leurs clients non plus un simple produit mais un service correspondant à un usage. Et le digital leur ouvre de nouvelles possibilités.

Les constructeurs automobiles s’adaptent aux nouvelles façons de consommer la voiture

Une marque ne peut plus envisager de se développer sur la seule vente de produits : les consommateurs veulent désormais une réponse à leur besoin, qui ne se résume pas à l’achat d’un bien. Le métier des constructeurs automobiles n’est ainsi plus uniquement de vendre des voitures. L’automobile se consomme maintenant de bien des façons : elle se partage avec Blablacar, elle se loue, notamment entre particuliers, elle se commande pour un trajet via des applications comme Uber, etc.

Ford, entre autres, multiplie les initiatives pour répondre aux usages émergents. Depuis le mois de février dernier, la marque expérimente à Austin, au Texas, une offre de financement permettant à un groupe de 3 à 6 personnes d’acheter en commun un véhicule. Ce programme, baptisé Ford Credit Link, s’adresse à des voisins souhaitant partager l’acquisition d’un pickup, à des familles multiconducteurs, etc. Mais Ford ne propose pas uniquement un financement pour le groupe : son offre comprend une application mobile permettant aux différents conducteurs de gérer leur utilisation communautaire du véhicule (consultation de sa disponibilité, réservation, localisation…), de suivre son état et son entretien, de régler les échéances du crédit, etc. La marque ne vend plus une voiture : elle propose une solution de mobilité.

Autre constructeur : General Motos teste à New York la mise à disposition pour les habitants d’un immeuble d’une flotte de voitures en location. Les occupants du bâtiment peuvent en disposer de la même façon qu’ils ont accès aux machines à laver de la buanderie de l’immeuble. Une application dédiée leur permet de réserver une voiture au moment de leur choix. Et pour une expérience de mobilité complète, ils bénéficient du parking gratuit dans 200 garages de Manhattan.

Et si demain l’achat d’une maison prévoyait aussi un service de home staging pour sa revente ?

L’initiative vient d’un petit constructeur, Bowie, qui imagine une nouvelle façon de vendre des maisons individuelles. Son idée, décrite par un article des Echos : proposer des logements réellement clés en main. Bowie se charge de l’intégralité du projet : conception, obtention du permis de construire, construction de la maison, mais aussi décoration intérieure, mobilier, électroménager…

L’acheteur choisit un style (urbain, minimaliste, connecté…) et un niveau de prestations dont les prix varient de 1 350 à 2 000 euros le mètre carré selon la nature du terrain, la qualité des prestations et du mobilier choisis. « L’acquéreur n’a plus qu’à poser ses valises », résume Les Echos. Il trouvera sa maison entièrement meublée et équipée. Il pourra aussi bénéficier de services facilitant son installation : inscription à l’école, à la crèche, assurances habitation, etc. Il peut également opter pour des prestations de conciergerie 24/7.

« On s’occupe de tout comme si vous étiez à l’hôtel », explique Pierre Constant, le jeune entrepreneur à l’origine de l’idée. Il est soutenu par la BPI, la région Centre et des investisseurs privés, avec l’objectif de vendre 1 000 à 2 500 maisons la première année, et jusqu’à 3 500 d’ici 2018, indique Les Echos.

Bowie se charge aussi de revendre ses maisons avec l’intervention d’une équipe de home staging, comme dans les émissions de télé, pour reloooker la maison au frais de la société, l’entreprise se rémunérant, comme les agences immobilières, sur le prix de vente.

Lunettes et brosses à dent en abonnement

S’adapter aux besoins des clients en leur proposant plus que la propriété d’un produit… Les initiatives foisonnent. Le site Idées Locales a repéré un opticien dans le 3e arrondissement de Paris, La Fabrique de lunettes, qui loue des montures. « Marc Jacobs, Andy Wolf, Tom Ford, Chloé, Emmanuelle Khanh ou Prada, toutes les collections de lunettes signées par les plus grands fashion designers deviennent enfin accessibles grâce à un service de location de montures simple et inédit », explique l’opticien. L’enseigne annonce un montage en 15 minutes dans 80 % des corrections. La Fabrique de lunettes propose des formules d’abonnement de 3 à 12 mois pour « changer de monture comme de chemise » ou un tarif à la carte pour un look d’un soir.

L’abonnement fait partie de ces modèles qui ont le vent en poupe. Des grandes marques s’y mettent, comme Apple ou Samsung qui proposent désormais leurs téléphones via des « Upgrade Programs » : un système d’abonnement mensuel permettant de changer tous les ans de smartphone.

Sur un tout autre secteur, il est maintenant possible de s’abonner pour recevoir régulièrement une brosse à dents made in France, de la marque Bioseptyl. Le client choisit un abonnement individuel ou familial, ainsi que la fréquence de renouvellement, de 1 à 3 mois. Et quand la nouvelle brosse arrive, il peut glisser l’ancienne dans une enveloppe préaffranchie pour que son manche soit recyclé. Une de ces nouvelles idées malignes qui donnent le sourire en apportant du service !

De nouveaux services grâce aux objets connectés

Demain, le trait d’union entre produits et expérience client devrait aussi passer par le développement des objets connectés. Ils en sont encore à leurs prémices, mais devraient à l’avenir gagner des sphères de plus en plus nombreuses de notre quotidien. Par exemple, s’il est maintenant possible de louer des lunettes, il est également possible de les géolocaliser. Pour ceux qui ne retrouvent jamais leurs montures, les opticiens Atol proposent depuis la fin 2015 un modèle connecté : Téou d’Atol. Ces lunettes sont commercialisées avec une appli mobile qui permet de les géolocaliser.

Dans un autre univers, le groupe Seb voit l’avenir des appareils électroménagers dans les objets et les services connectés. Son multicuiseur Cookeo est ainsi entièrement conçu pour fonctionner avec une application mobile : l’utilisateur y trouve des recettes, qu’il va pouvoir réaliser grâce à des tutoriels « pas à pas », et qu’il va aussi transférer vers la cocotte intelligente, qui mettra en œuvre la cuisson adaptée. Fin 2015, Seb indiquait que l’appli Cookeo avait été téléchargée 60 000 fois (ObjetConnecté.net).

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