L’économie circulaire made in H&M

22/10/2015

H&M s’est fixé un objectif ambitieux : 100 % de coton provenant de sources écoresponsables dans ses vêtements d’ici 2020. Responsable du département RSE de H&M France, Rémi Crinière fait le point sur la façon dont la marque entre dans l’économie circulaire. Il lève aussi le voile sur les idées reçues sur la « fast fashion ».

Rémi Crinière

H&M a lancé fin août un concours international intitulé Global Change Award. De quoi s’agit-il ?

Rémi Crinière : C’est une initiative de la Fondation H&M Conscious. L’objectif est de trouver les meilleures idées, où qu’elles soient sur la planète, pour développer l’économie circulaire dans la mode. Avec une vision très large : les projets peuvent porter sur l’ensemble du cycle de vie d’un vêtement, que ce soit très en amont, au niveau de la conception ou du choix des matières premières, ou en aval, après la vente. Global Change Award doit permettre d’identifier des idées à des stades très précoces, qui n’auraient jamais vu le jour sinon, et qui seront accompagnées durant un an pour leur mise en œuvre. En un mois, à mi-parcours, 2000 demandes de dossiers de participation ont été faites depuis 102 pays.

Plus d’infos : Global Change Award

Il reste encore des choses à inventer dans l’économie circulaire ?

Tout reste à inventer, ou presque ! L’économie circulaire est encore très loin d’être la norme, quel que soit le pays ou l’industrie. De façon générale, la prise de conscience que l’accès aux ressources naturelles n’est pas illimité est relativement récente. C’est ce qui impose de repenser les modes de production en passant d’une économie linéaire, où l’on prend des ressources, on les transforme et on les jette, à une économie circulaire, où les biens produits peuvent être recyclés ou réemployés.

H&M est déjà engagé dans la collecte de vêtements d’occasion…

Depuis 2 ans et demi, nous proposons en effet un service de collecte de textile en magasin pour lutter contre le gaspillage des textiles et préserver les ressources naturelles. Nous offrons à nos clients des bons d’achat quand ils nous apportent des vêtements dont ils ne se servent plus, achetés ou non chez H&M, ou même du linge de maison. Aujourd’hui, une grande partie des articles collectés continuera sa vie sur des marchés de seconde main. Mais cette initiative doit aussi nous permettre de créer un gisement pour disposer de plus de textile recyclé dans nos collections. Nous ne sommes encore qu’au début. Notre objectif pour 2020 est d’avoir 100 % de coton écoresponsable, qu’il soit biologique, recyclé ou issu de la Better Cotton Initiative, un programme qui encourage les bonnes pratiques dans la culture du coton.

Quel est le volume de vêtements ainsi collectés en France ?

Nous avons déjà récolté en magasin 1 563 000 kg de textile. C’est l’équivalent du poids de 7,8 millions de tee-shirts. Avec un retour très positif de nos clients. Cette initiative permet de sensibiliser au gaspillage textile, tout en proposant une façon simple et ludique d’y pallier. C’est une action très visible, mais elle ne couvre qu’un des aspects de l’économie circulaire. Nous avons adopté des pratiques responsables dès le design de nos vêtements, dans le choix des matières premières, et tout au long de la chaîne de production et de transport. Par ailleurs, nous utilisons aussi du polyester recyclé, fabriqué à partir de bouteilles en plastique. En 2014, nous avons ainsi permis la transformation de 40 millions de bouteilles PET.

H&M propose aussi une collection Conscious qui revendique l’utilisation de matières écoresponsables…

La collection H&M Conscious Exclusive nous permet en effet de démontrer qu’il est possible de faire de la mode écoresponsable. C’est une collection « capsule », sur des volumes limités et des vêtements très « mode », qui ont vocation à être portés par des célébrités sur les tapis rouges de grands événements mondiaux. Au-delà de cette collection, nous proposons aussi toute l’année en magasin des articles H&M Conscious fabriqués à partir de matières écoresponsables, comme le coton biologique ou le polyester recyclé, par exemple. Enfin, toutes nos collections bénéficient de nos exigences de qualité et d’un cahier des charges très strict sur les conditions de fabrication et l’impact environnemental lors de la production et du transport.

L’économie circulaire est-elle un argument de vente dans la mode ?

Pas encore. Cela peut même être le contraire si l’on n’y prend garde. Si vous dites simplement aux consommateurs « achetez mon produit car il est recyclé », il peut être perçu comme étant d’une moins bonne qualité. Or, les gens achètent d’abord des produits qui leur plaisent avec un prix qui leur convient. L’argument de l’économie circulaire n’est pas suffisant pour vendre, mais il est une valeur additionnelle qui va conforter le choix d’un client. Chez H&M, nous mettons tout en œuvre pour offrir à nos clients une mode de qualité, au meilleur prix et de manière responsable. Nous sommes une entreprise suédoise qui intègre dans sa culture, depuis sa création en 1947, le respect de l’homme et de l’environnement. H&M est aussi resté un groupe familial. Ce qui fait que nos actions ne se mesurent pas uniquement selon des critères de rentabilité à court terme : H&M recherche un business model viable qui doit lui permettre d’avoir toujours des magasins dans 30 ou 40 ans. L’économie circulaire fait pleinement partie de cette démarche et de cette responsabilité.

Est-ce que l’économie circulaire ne s’oppose pas à la fast fashion ?

Elle vient en opposition de la perception que l’on peut avoir de la fast fashion. Quand on emploie ce terme, on imagine des vêtements produits, non seulement en petite quantité, mais aussi très rapidement et dans de mauvaises conditions environnementales et sociales. Chez H&M, quand une collection arrive en magasin, sa conception a commencé en moyenne un an avant ! Elle n’est pas créée en 15 jours. Et nos produits sont conçus pour durer, aussi bien en termes de qualité que de style, donc ce n’est pas du jetable.

En fait, la seule chose qui soit « fast » chez H&M dans la vie du produit, c’est la durée de vie en magasin. C’est à dire que nous proposons un grand nombre de références produites dans des séries courtes et qui sont très vites vendues. Cela permet à chacun de trouver son style et de s’habiller selon sa personnalité, avec des vêtements que l’on ne verra pas portés par tout le monde. Cette possibilité de changer de collection très rapidement n’est pas liée à la façon dont les vêtements sont fabriqués. Si nous n’avions qu’une collection par saison, avec bien moins de références mais les mêmes volumes de vente, notre impact sur l’environnement serait le même au final. C’est donc une question de perception avant tout.

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