Comment les hôtels se réinventent face à Airbnb et Booking
03/03/2016Les hôtels sont confrontés aux nouveaux comportements des consommateurs, qui comparent et achètent via les sites de réservation en ligne, ou qui optent pour la location entre particuliers. Pour reprendre la main, les établissements adoptent les codes de la génération Y, pour proposer des séjours plus collaboratifs, plus connectés, plus surprenants aussi. Le design des hôtels se réinvente, ainsi que le management. Illustrations.
1Le PDG d’AccorHotels installe un « comex fantôme » issu de la génération Y
Comment rester dans la course face à la concurrence d’acteurs comme Airbnb ou Booking ? « 80 % de toutes les entreprises digitales ont été créées par des personnes âgées de moins de 35 ans, quand 90 % des décisions sont prises par les plus de 50 ans chez AccorHotels », constate Sébastien Bazin, le PDG du groupe hôtelier (en photo ci-dessus). Début février, il a annoncé une mesure originale : la mise en place d’un « shadow comex », selon son expression. Autrement dit un « comité exécutif fantôme », composé de salariés de moins de 35 ans.
Cette instance se réunira une fois par mois pour apporter au comité exécutif la vision de collaborateurs appartenant à la génération Y. « Plus aucune décision ne sera prise sans leur demander leur avis », assure le PDG, qui s’est engagé à leur transmettre toutes les informations dont il dispose, qu’elles soient financières, juridiques ou concernent l’actionnariat.
Pour composer ce « shadow comex », Sébastien Bazin a demandé à chaque membre du comité exécutif de proposer le nom de deux cadres de 25 à 35 ans, avec au moins 5 ans d’ancienneté. La moitié a été retenue pour former ce comex bis non seulement rajeuni, mais aussi plus féminin : il accueille 7 femmes et 6 hommes, contre 2 femmes uniquement dans le comex officiel. Il est aussi plus international, comptant 7 nationalités différentes. « Ils ne seront peut-être pas d’accord avec nous 50 % du temps mais cela devrait être une bouffée d’oxygène », estime le PDG.
Plus d’infos : Les Echos, L’Expansion
2Hilton crée une enseigne pour la génération Y
Hilton a annoncé fin janvier le lancement d’une nouvelle marque, Tru by Hilton, visant une clientèle jeune sur le créneau des hôtels milieu de gamme (75 à 100 dollars la nuit). C’est un marché à fort potentiel, mais les jeunes consommateurs ne sont pas habitués à séjourner dans les Hilton. Pour les séduire, le groupe a donc repensé ses codes, imaginant des établissements avec un design fort et moderne, et porteurs d’un état d’esprit collaboratif et connecté, en lien avec la génération Y.
Les hôtels Tru by Hilton auront ainsi un grand hall d’accueil baptisé le « hive » (la ruche). Conçu dans l’optique de favoriser les rencontres et les échanges, il s’organisera autour de 4 zones, pour se reposer, travailler (avec un vrai espace de co-working), manger et jouer (avec des babyfoots intégrés). « Les voyageurs que nous visons ont des aspirations communes lorsqu’ils sont en déplacement, y compris un désir pour des interactions humaines, une personnalisation et un environnement qui permettent de créer des expériences », explique Alexandra Jaritz, responsable de la nouvelle marque.
Les hôtels Tru by Hilton proposeront aussi un mini-supermarché ouvert 24h/24, un club de gym, des petits déjeuners gratuits et copieux à « composer soi-même », du wifi avec un débit permettant de regarder des films en streaming, etc. Sans oublier des chambres de grand confort, avec salle de bain spacieuse et 150 chaînes disponibles sur la télé grand écran. Les premiers hôtels Tru by Hilton ouvriront leurs portes fin 2016 en Amérique du Nord, 102 établissements étant déjà programmés sous cette nouvelle enseigne.
Plus d’infos : L’ADN, Tru by Hilton
3CitizenM, des établissements digitalisés pour un luxe accessible
Sur un positionnement légèrement supérieur à celui visé par Tru by Hilton, l’enseigne CitizenM existe depuis 2008 et compte 7 hôtels dans le monde, bientôt 14. Très actuels dans leur design, ces établissements qui proposent un luxe accessible ont misé sur un parcours client très numérique. Le Journal du Net vient de visiter l’hôtel CitizenM le plus récent, installé à Times Square, en plein cœur de Manhattan. « Pour rendre l’expérience aussi fluide que possible, rien de mieux que le digital », décrit le Journal du Net.
Le parcours client nouvelle génération commence dès le check-in. Comme l’explique Noreen Chadha, General Manager de l’établissement new-yorkais : « Pas de queue à la réception, ni de longues minutes à attendre que le réceptionniste recopie le passeport, ni même d’inconfort lorsqu’on se demande si on doit donner un pourboire au groom qui monte les bagages. Il n’y a tout simplement pas de réception ! Seulement des ordinateurs où chacun réalise son check-in en quelques instants. »
Pour s’enregistrer, le client peut compter si besoin sur l’aide d’un « ambassadeur » de l’hôtel (le nouveau nom pour désigner le personnel). CitizenM assure en tout cas que le « self check-in », entièrement optimisé, prend moins d’une minute. Il se termine par l’obtention d’une carte RFID, qui sert de clé pour la chambre et permet aussi de régler ses achats dans l’hôtel.
CitizenM ne propose qu’un seul type de chambre : la chambre double. Tout ou presque peut s’y contrôler via une tablette à disposition. Et l’hôtel ne cherche pas à faire gonfler artificiellement la facture des clients : les tarifs du minibar ne sont pas excessifs, le wifi est gratuit, les appels téléphoniques sont au prix de la voix sur IP, etc.
« Quant aux ambassadeurs, pointe le Journal du Net, ils tournent jour après jour sur toutes les tâches : check-in, bar, petit déjeuner, bagages… Chacun s’occupe de tout, ce qui simplifie aussi l’expérience du client, à qui on ne répondra pas que c’est au concierge qu’il faut s’adresser pour commander un taxi. » Digitalisé, l’hôtel n’en oublie pas l’importance de la relation humaine et de la qualité de service.
Plus d’infos : Le Journal du Net
4Déclic Hôtel, temple de la « selfie-mania » à Paris
Pour attirer les touristes, le Déclic Hôtel, qui s’est ouvert le 12 février dernier à Paris, s’inscrit sur une autre tendance forte : celle de la mise en scène sur les réseaux sociaux. « À l’heure du selfie tout-puissant, des réseaux sociaux tentaculaires, de la fièvre de l’Instagram, il fallait penser à adapter un hôtel à ce phénomène du ‘tout image’ », commente Le Figaro dans un article consacré à cet établissement 4 étoiles, de 18 chambres et 9 suites à Montmartre.
L’hôtel est entièrement dédié à la photographie et chaque chambre offre des possibilités différentes de s’amuser avec l’objectif. Dans la suite Diapositive, par exemple, 9 écrans constituent un diaporama face à un immense lit rond : au moment de la réservation, les clients peuvent envoyer leurs photos personnelles pour les apprécier dans leur chambre d’hôtel.
Une autre chambre dissimule un appareil photo dans un miroir pour des photos volées ; une autre encore est conçue comme un studio photo « vintage » ; ailleurs, des images sont projetées au sol, au plafond, etc. A voir jusqu’où les clients apprécieront cette frénésie photographique !
Plus d’infos : Le Figaro, Déclic Hôtel
5Les hôtels Hilton lancent la plus grande campagne de leur histoire pour promouvoir les réservations en direct
S’ils doivent trouver les moyens de proposer une expérience renouvelée et originale face aux locations entre particuliers, les hôtels doivent aussi renouer un lien direct avec leurs clients. Les consommateurs ont en effet pris l’habitude de passer par des sites de réservation en ligne comme Booking, Expedia ou Hotels.com. L’enjeu n’est pas uniquement relationnel. Une grande partie de la marge se joue ici : les sites de réservation en ligne prennent une commission allant de 15 à 20 %, et imposent leurs propres règles, pour l’organisation de promotions par exemple.
Dans ce contexte, les hôtels Hilton viennent de lancer aux Etats-Unis la plus grande campagne de leur histoire. Un seul objectif : inciter les consommateurs à réserver leur chambre directement sur Hilton.com. Pour la bande son de sa pub (ci-dessus), le groupe hôtelier a fait appel au classique des Rolling Stones, Satisfaction. Et pour la promesse, le message est simple : les meilleurs prix sont sur le site web de Hilton. Pas la peine de cliquer ailleurs (Stop clicking around). La campagne marketing qui accompagne la pub TV met l’accent sur les points de fidélité accordés en cas de réservation direct, qui permettent d’obtenir des nuits gratuites.
Plus d’infos : HospitalityNet
6AccorHotels booste son site de réservation
AccorHotels veut, lui aussi, retrouver le lien direct avec ses clients. Pour étoffer son offre d’hébergements et attirer les internautes, le groupe a ouvert son site accorhotels.com à des établissements indépendants. D’ici 2018, il prévoit d’y référencer l’offre de 6 000 hôtels ne faisant pas partie du groupe. Soit une augmentation de 160 % du nombre d’hôtels réservables via accorhotels.com, AccorHotels comptant environ 3 700 établissements.
Comme Booking ou Expedia, AccorHotels prend une commission sur les réservations, de 14 %. La différence ? « Le groupe connaît les problématiques des hôteliers et rend facile tout ce qui est fastidieux », avance un hôtelier référencé sur la plateforme et interrogé par le Journal du Net. Au-delà, les hôteliers, qui travaillent souvent avec plusieurs plateformes de réservation en ligne, ne semblent pas mécontents de voir arriver un concurrent au très puissant Booking.
Faisant feu de tout bois sur internet, AccorHotels vient par ailleurs d’investir dans deux plateformes de location d’appartements et de villas hauts de gamme, Squarebreak et Oasis Collections. L’objectif est ici de trouver des réponses au développement de la location entre particuliers. « Ces investissements vont nous aider à mieux comprendre les attentes des clients dans le marché de la location et d’être capables d’explorer une offre complémentaire », indique Vivek Badrinath, Directeur Général Adjoint d’AccorHotels.
Plus d’infos : Le Journal du Net, TOM
7Les 3 leviers d’AccorHotels pour générer de l’hyper-satisfaction
La stratégie d’AccorHotels vous intéresse ? En novembre dernier, son directeur Expérience & Satisfaction Client, Olivier Arnoux, nous avait accordé une interview riche d’enseignements. Il y parle très ouvertement des défis liés à l’arrivée de nouveaux acteurs et de nouveaux intermédiaires. Mais sans oublier les défis liés à l’expérience client sur le terrain : comment faire pour proposer la meilleure expérience possible et générer de « l’hyper-satisfaction » ?
« Nous disposons de 3 leviers clés pour cela, indique Olivier Arnoux. Tout d’abord, il nous faut parfaitement maîtriser les fondamentaux : l’accueil, la literie, le croissant… Deuxième levier : la personnalisation. Que ce soit dans un Ibis Budget ou au Sofitel, les clients veulent un séjour personnalisé. Ce qui passe par la connaissance client. (…) Cela commence par des choses très simples : savoir si un client qui réserve est célibataire ou a une famille avec 5 enfants, s’il a l’habitude de demander une chambre à côté de l’ascenseur, s’il veut recevoir sa facture par e-mail… »
Troisième levier : l’intelligence émotionnelle. « Nous devons créer de l’émotion, poursuit Olivier Arnoux. Désormais, un client n’attend pas uniquement qu’on lui dise ‘Vous êtes unique’, mais aussi ‘Vous êtes spécial’. Il recherche le petit plus qui va générer de la surprise. Pour créer cet effet ‘waouh’, il faut pouvoir sortir des procédures. La problématique est donc aussi RH et managériale. L’hyper-satisfaction vient de la combinaison de ces trois leviers. »
Retrouvez toute l’interview d’Olivier Arnoux, du Directeur Expérience & Satisfaction Client d’AccorHotels : « Mon job est de tuer mon job ! »