Les murs tombent entre les marques et les consommateurs
01/06/2017Prendre son ordinateur portable et aller travailler en coworking dans l’agence bancaire au coin de la rue, dans une concession automobile ou dans un magasin de meubles ? C’est un phénomène qui monte : des marques ouvrent leurs portes pour tisser de nouveaux liens avec les consommateurs et revitaliser les points de vente physiques.
1Volkswagen ouvre ses concessions aux coworkers
Vous cherchez un bureau pour y travailler quelques heures ou pour monter une réunion ? Pourquoi ne pas réserver un espace dans une concession Volkswagen ? C’est ce que propose le constructeur depuis ce printemps 2017. Son initiative s’adresse à un large public de travailleurs nomades, commerciaux de passage, entrepreneurs, formateurs, etc. Sur les 380 concessions situées en France, une centaine ont déjà rejoint le projet.
L’enjeu pour la marque n’est pas uniquement de rentabiliser son parc immobilier. Il s’agit d’abord d’une stratégie relationnelle visant à « réinventer un lien physique fort avec le grand public ». Pour Thierry Sybord, directeur de Volkswagen France, c’est « un moyen d’offrir une expérience client innovante et de créer de nouvelles relations. »
Car même dans l’automobile, « le parcours client passe maintenant par Internet. Il faut imaginer une autre expérience client et trouver d’autres moyens de faire venir le grand public dans les concessions », ajoute dans L’Usine Digitale Vincent Panier, président de Base10, la startup spécialisée dans la location de bureaux vides avec laquelle Volkswagen s’est associée pour gérer les réservations dans ses concessions.
Les tarifs ? 9 € HT la demi-journée pour une place de coworking dans un espace ouvert, 15 € HT pour un bureau fermé et 3 € HT par personne pour une salle de réunion.
2Partager le bureau de son assureur ou de son banquier…
Le coworking pour entrer en contact avec de nouveaux publics : l’idée fait également son chemin dans l’univers de la banque et de l’assurance. Depuis le mois de décembre 2016, dans la région Nouvelle-Aquitaine, une vingtaine d’agences de la Société Générale ouvrent ainsi leurs portes aux indépendants et aux salariés nomades. Ici aussi, la startup Base10 organise la location des espaces de coworking.
D’autres réseaux se sont lancés dans l’expérience, comme le recense Les Échos : Groupama Centre-Atlantique, dont 8 agences pilotes proposent de louer des espaces, toujours avec Base10 ; la Banque Populaire du Sud, qui a créé sa propre application de réservation mais qui dédie son offre à ses sociétaires ; ou encore LCL, qui loue à Paris plusieurs espaces de travail dans son siège historique récemment rénové.
Banques et assureurs affirment ne pas chercher dans le coworking une nouvelle source de revenus. La priorité, à l’instar de Volkswagen : animer des points de vente de moins en moins fréquentés par les clients. Pour Pierre Cordier, directeur général de Groupama Centre-Atlantique, « l’objet n’est pas de rentabiliser des bureaux vacants mais bien d’accueillir des acteurs économiques de toute sorte pour créer des liens avec eux et générer de nouvelles opportunités commerciales. Nous voulons utiliser cette expérience à titre de laboratoire pour mieux nous connecter avec la vie économique locale ».
C’est aussi un moyen de faire évoluer la culture interne, en mettant les salariés de ces agences en contact avec d’autres façons de travailler portées par les coworkers indépendants et nomades.
3En Pologne, Idea Bank met le coworking sur des rails
Pour renouveler la relation avec ses clients et leur proposer de nouvelles expériences, une banque polonaise va encore plus loin dans l’utilisation du coworking : Idea Bank, dont la clientèle est exclusivement composée de petites entreprises, a ajouté une voiture spéciale dans une partie des trains reliant les grandes villes du pays (Cracovie, Wrocław, Poznań) à la capitale Varsovie. Baptisé Idea Hub Express, ce wagon (en illustration ci-dessus) a été transformé en espace de coworking, proposant imprimantes, scanners, chargeurs de téléphone, machines à café… Il permet aussi de se retrouver à plusieurs pour des réunions.
Accueillis par des conseillers de l’établissement, les clients de la banque sont prioritaires pour l’attribution des places disponibles, mais les autres voyageurs sont également bienvenus, explique le site spécialisé dans l’innovation financière « C’est pas mon idée », qui ne trouve qu’un seul défaut à cette initiative : elle ne dure que 3 mois !
4Staples, le grand frère d’Office Depot, installe des « workbars » dans ses magasins
Connaissez-vous l’enseigne américaine Staples ? Ce géant de la distribution de fournitures de bureau s’apparente à Office Depot. Le défi actuel de Staples, qui compte plus de 1 500 magasins aux États-Unis : les consommateurs se détournent de ses points de vente physiques. Selon Bloomberg, 60 % de ses ventes sont désormais réalisées en ligne. Conséquence : l’enseigne a fermé 300 de ses magasins depuis 2014, et prévoit encore 70 fermetures dans les prochains mois.
Et si l’avenir du réseau de Staples était dans le coworking ? C’est le mouvement que vient d’amorcer l’enseigne en transformant trois de ses magasins à Boston pour accueillir, dans un espace dédié, des freelances et des entrepreneurs en quête d’un lieu de travail. Sous l’appellation Workbar, Staples a structuré une offre complète autour d’un abonnement à 130 $ par mois, comprenant l’accès à des salles fermées pour des réunions, la possibilité de travailler deux jours dans un des autres magasins de Staples, etc.
L’objectif est bien sûr de recréer du trafic en magasin sur une cible de TPE et de travailleurs nomades et indépendants, auprès de qui Staples veut se positionner comme un « partenaire indispensable ».
5Le showroom parisien de Made.com s’anime grâce au coworking
Dans une approche très événementielle, le site de vente de meubles en ligne Made.com a également eu recours, le 24 mars dernier, au coworking pour faire venir dans son showroom parisien de jeunes freelances. L’enseigne s’est associée à la startup OfficeRiders pour organiser une journée Work’n’Roll sur le thème du coworking, proposant un ensemble d’activités : dégustation de café, séance de yoga, shooting photo pour le profil LinkedIn, massage, etc. 60 professionnels tirés au sort après inscription ont pu en profiter. Jessica Delpirou, directrice générale de Made.com, expliquait à cette occasion au Figaro : « On ne veut pas être qu’un lieu de vente, mais aussi un lieu de vie. »
6La SNCF met en location ses propres voitures de service !
Des clients qui viennent travailler dans les locaux des entreprises… Ce nouveau type de relations entre marques et consommateurs, basées sur l’économie du partage, trouve également déjà d’autres formes. La SNCF met par exemple désormais en location ses propres voitures de service.
L’initiative est portée par OuiCar, spécialiste de la location de voitures entre particuliers, et racheté en 2015 par la SNCF. La startup propose de louer les véhicules de la SNCF le week-end, quand ils sont inutilisés et garés sur le parking à côté des gares. Les voitures, des citadines récentes logotypées SNCF, ont été équipées d’un boîtier permettant d’ouvrir les portes grâce à l’application mobile de OuiCar. Ainsi, pas besoin de remettre les clés. L’appli permet aussi de réaliser l’état des lieux et de contrôler le niveau de carburant et le kilométrage.
« La SNCF se demande comment proposer un service porte-à-porte à ses voyageurs, et ce service est là pour répondre à cette préoccupation », explique au site ZDNet Marion Carrette, la fondatrice de OuiCar. « Il y a 3 000 gares en France », ajoute-t-elle, mais 150 uniquement disposent d’une agence de location de voitures.
Après une expérimentation dans cinq gares bretonnes, ce service est en cours de déploiement dans la France entière, avec l’objectif d’être présent dans 100 gares d’ici la fin de l’année. Tarifs : entre 15 et 26 € par jour le week-end. Soit des prix de 30 à 40 % inférieurs à ceux pratiqués par les loueurs traditionnels, indique OuiCar.
7Bureau la semaine, église le dimanche
Une dernière illustration des vertus du partage : dans le Vieux Lyon, un même lieu est à la fois un espace de coworking en semaine, et une église le week-end ! À l’origine de sa création fin 2016, Timothée Pomier, 28 ans, qui a un double profil : pasteur de l’Église protestante évangélique et graphiste freelance. En tant que pasteur, il cherchait un lieu de culte pour les protestants évangéliques du quartier, une vingtaine de personnes (leurs églises présentent la particularité de ne pas avoir de signes religieux). Et en tant que freelance, il voulait un endroit pour travailler en dehors de chez lui.
Avec une associée, il a créé l’association Polygones et a transformé un ancien restaurant en local de coworking de 17 postes de travail sur 120 mètres carrés, dont le mobilier se replie, permettant la transformation en église le dimanche. « Cet espace n’est pas réservé aux chrétiens. Tout le monde peut venir y travailler », précise le pasteur. Ce lieu est en tout cas une première en France.
Plus d’infos : La Croix et 20 minutes
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Starbucks ouvre un magasin dédié aux commandes passées par mobile
Lancée en 2015, l’appli mobile de Starbucks permet de commander et de payer en avance son macchiato pour éviter de faire la queue en magasin. Un succès : Starbucks a plus d’argent sur son appli de paiement que certaines banques de dépôt, et 4 paiements sur 10 sont désormais réalisés via mobile, comme nous le soulignions dans notre dossier « Les marques vont-elles devenir des banques ? ». Revers de la médaille, la file d’attente « virtuelle » s’allonge, au point qu’il faille parfois attendre plus longtemps pour obtenir son café que les clients qui n’ont pas précommandé. Un comble auquel l’enseigne veut remédier en testant une boutique réservée aux clients qui auront commandé via l’appli.