Comment la Française des Jeux ouvre les chakras de l’expérience client
18/02/2021« L’expérience client crée de la valeur et du business. » C’est le crédo de Florence Bouchot, Responsable Culture Clients (CX) chez FDJ. Elle détaille les actions qu’elle mène pour insuffler une culture client auprès de l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise.
Depuis 5 ans, la Française des Jeux se transforme pour passer d’une culture produit à une culture client. Quel a été le point de bascule ?
Florence Bouchot : C’est la conjonction de plusieurs facteurs. L’entreprise s’est réorganisée pour mettre le client au centre afin de pouvoir innover, développer de nouvelles offres et de nouvelles activités et améliorer les parcours clients. Notamment en dehors des jeux d’argent, autour du divertissement et de l’eSport.
L’innovation se traduit par de nouveaux services sur les lieux de vente. Par exemple, des solutions de paiement reliées aux terminaux FDJ pour pouvoir payer ses impôts, ses amendes, ses factures de crèche, etc. C’est la première grande raison : pour innover, il nous fallait mieux comprendre les clients, leurs besoins, leurs attentes.
L’enjeu était aussi de se différencier des autres opérateurs de paris sportifs en ligne. Ce marché s’est ouvert à la concurrence en 2010. Nous voulons créer de la préférence avec notre offre de paris sportifs et fidéliser les joueurs. C’est impossible à atteindre si on ne place pas le client au centre de nos décisions.
Vos clients, ce sont à la fois les joueurs et les détaillants ?
Nous avons même trois types de clients, et tout ce que nous faisons en expérience client couvre ces trois dimensions. À la fois, les clients finaux – les joueurs –, les clients pros, qui sont les commerçants partenaires, c’est-à-dire les détaillants, et les collaborateurs. Nous faisons en sorte que l’expérience client soit l’affaire de tous dans l’entreprise.
FDJ est par ailleurs présente à la fois sur le canal physique et le digital. Notre offre de jeux est distribuée dans près de 30 000 points de vente, ainsi qu’en ligne sur les sites FDJ.fr et Parions Sport en Ligne, et sur les applis FDJ et Parions Sport En Ligne.
Comment cette culture client se met-elle en place dans l’entreprise ?
Ma mission, c’est d’acculturer individuellement et collectivement les collaborateurs pour les engager et les rendre acteurs de l’expérience client. Je m’adresse à l’ensemble des 2 500 salariés de l’entreprise, répartis sur plusieurs sites. Pour imaginer et développer des dispositifs adaptés, je suis d’abord allée sonder un certain nombre de managers et de collaborateurs sur leur maturité en termes d’expérience client, et sur leurs besoins métiers. Cela permet de bien mesurer que la culture client ne s’infuse pas à la même vitesse et de la même façon pour tout le monde dans l’entreprise. Certains ont un niveau de maturité plus avancé. Ils sont convaincus et prêts à s’engager, mais ne savent pas comment s’y prendre. D’autres ont besoin de plus d’inspiration, d’exemples concrets convaincants et d’accompagnement. C’est un peu de la dentelle pour nourrir les collaborateurs en fonction de leurs attentes et pour pousser le bon contenu aux profils qui en ont besoin.
J’identifie à l’extérieur des tendances, des bonnes pratiques d’entreprises référentes en matière d’expérience client, pour inspirer, donner des idées, montrer ce que cela signifie concrètement d’être centré client. Et les bénéfices que cela occasionne. Je restitue beaucoup de contenus en interne.
Nous faisons bien sûr aussi de nombreuses observations terrain « ethnographiques » et nous rencontrons beaucoup de clients pour comprendre l’expérience qu’ils vivent. Nous disposons également d’un point de vente reconstitué dans notre Studio Clients à Boulogne. Il permet de se confronter au quotidien des détaillants, en plus des visites régulières que nous faisons sur le terrain.
Quel est le dispositif le plus emblématique que vous avez instauré ?
Cela fait deux ans que j’organise et que j’anime un rendez-vous mensuel, le Forum Culture Client. Pendant une heure, je partage avec l’ensemble des collaborateurs des sujets autour de l’expérience client. Cela peut être des démarches centrées clients internes présentées par les personnes qui les mettent en œuvre. C’est aussi l’occasion d’inspirer les collaborateurs avec des bonnes pratiques extérieures : je fais venir des intervenants qui témoignent de leurs réalisations, de leur organisation, de leurs outils de mesure de l’expérience client, etc. C’est une ouverture des chakras. C’est important de donner des exemples concrets, de démontrer que l’expérience client crée de la valeur et du business, avec des thématiques qui parlent à tout le monde.
En janvier dernier, nous nous sommes penchés sur les tendances 2021 de l’expérience client avec Thierry Spencer, un sujet qui peut inspirer le plus grand nombre et semer de petites graines. En décembre, nous avons traité du rôle des émotions dans l’expérience client, sous la forme d’une table ronde avec trois regards différents.
J’organise aussi des conférences thématisées « CX business », toujours pour bien montrer que l’expérience client crée du business. J’ai fait venir des entreprises comme Decathlon, la Maif, L’Oréal Cosmétique Active, etc.
Quelle forme prend concrètement ce forum mensuel ?
Au départ, les Forums étaient en présentiel, dans notre Studio Clients sur notre site de Boulogne, rassemblant chaque mois une cinquantaine de personnes directement concernées par l’expérience client. Avec la crise sanitaire, ces Forums se sont d’abord poursuivis en visio avec Teams. Ce qui a été une opportunité : ils ont été relayés par la Communication interne, ce qui a accru leur audience. Et depuis septembre, ils sont filmés en Live depuis nos studios télé FDJ, où nous tournons les émissions comme le tirage du Loto. Ce qui permet aussi de les diffuser en replay à partir de l’espace Culture Clients dans l’intranet. Cet espace héberge des synthèses et comptes-rendus de conférences auxquelles j’assiste, les vidéos des conférences CX Business et Forums Culture Clients, toute la connaissance comportementale et émotionnelle de nos 5 profils de clients, des idées de lectures inspirantes et quelques newsletters dont Le Hub de La Poste !
Quel autre dispositif existe dans l’entreprise ?
Nous avons élaboré un outil de travail baptisé le « Kit joueurs » pour aider tous les collaborateurs à mieux connaître nos clients, comprendre leurs enjeux, afin de mieux les satisfaire. Il trouve son origine dans une étude « usages et attitudes » réalisée pour créer une segmentation comportementale de nos clients. Elle a fait émerger 5 groupes de joueurs, mais elle donnait des résultats quantitatifs assez froids. On ne savait pas pourquoi ils adoptaient ces comportements. Alors, avec plusieurs collaborateurs issus de différentes directions et Business Units, nous sommes allés à la rencontre de ces clients pour comprendre les besoins derrière ces comportements et identifier des personae.
Parallèlement, nous avons demandé aux collaborateurs quels étaient leurs besoins en termes d’informations sur les clients. Qu’ont-ils besoin de savoir quand ils travaillent sur une offre de jeu ou de service ? Cela a donné naissance au « Kit joueurs », avec des infos sur le profil des clients, leurs comportements, leur façon de gérer leurs dépenses, leur regard sur le point de vente, sur le digital, leur point de vue sur leur image de joueur, sur la marque FDJ, etc. Il y a tous les parcours clients, avec les moments de vérité, les émotions associées, des verbatims, et des leviers d’action : les incontournables à activer pour FDJ pour chaque typologie de joueurs pour construire des offres et des services. Ce kit pointe les endroits importants pour le client, mais sans chercher à apporter de solutions aux métiers de l’entreprise. Nous n’intervenons pas à leur place, mais nous leur donnons des clés.
La crise sanitaire a-t-elle eu un impact sur vos missions ?
Nous avons réussi à poursuivre nos démarches centrées client et les dispositifs Culture Client. Nous avons continué nos entretiens avec les clients en visio, tout comme nos ateliers d’idéation et d’itération. Notre activité n’a pas été réduite. On se demandait au départ si les clients accepteraient de se livrer en visio. Mais c’est le contraire qui se produit. Nos questions semblent apporter une respiration dans un quotidien monotone. Les gens ont besoin de rompre l’isolement et d’échanger.
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