Pourquoi Decathlon abandonne son programme de fidélité
Une décision de rupture, synonyme de lucidité et de courage. Une première aussi dans le secteur de la distribution. C’est en ces termes que Bertrand Destailleur, associé du cabinet de conseil Equancy, commente dans LSA l’abandon par Decathlon de son programme de fidélité. Le choix de l’enseigne de sport a été peu médiatisé, mais en mars dernier, Decathlon a bien prévenu ses clients par mail de l’arrêt de son programme de fidélité (l’image ci-dessus). L’enseigne justifie cette décision en mettant en avant le tweet d’un de ses membres, Jeremy, qui écrit : « Je suis client depuis des années avec la carte de fidélité et ça donne seulement 6 € de bon d’achat ! Il y a de quoi être déçu. »
Privilégier d’autres leviers de fidélisation
« Un programme de fidélité ne peut fonctionner durablement sur sa seule mécanique de récompense, décrypte Bertrand Destailleur. Dans la distribution, les taux de générosité des programmes oscillent entre 1 % et 3 %, parfois 4 % (…) Ce qui frustre le fidèle habitué aux -15 % ou -20 % des périodes promotionnelles, par nature ouvertes à tous. » Et difficile de se montrer plus généreux : pour Decathlon, augmenter de 33 % son taux de récompense ne donnerait que 8 € à Jeremy, au lieu de 6 €. Ce qui ne changerait pas la frustration de ce client, mais priverait l’enseigne de ressources pour financer d’autres leviers de fidélisation : des services innovants, des surprises scénarisées au bon moment, des expériences mémorables, etc.
L’enseigne promet des prix bas à chaque visite
Decathlon ne renonce pas pour autant à mettre en avant l’argument prix, bien au contraire. « Nous nous engageons à vous proposer encore plus de prix bas tous les jours ! En 2017, nous avons déjà baissé le prix de plus de 1 200 produits, écrit l’enseigne à ses clients. Plutôt qu’un chèque de réduction de temps en temps, vous bénéficiez à chaque visite de ces baisses de prix sur nos produits. »
Les clients sont fidèles aux expériences, pas aux programmes de fidélité
Avec l’arrêt de ce programme, l’enseigne se prive de la connaissance client que lui amenait la carte de fidélité grâce au tracking des achats. Mais pour Bertrand Destailleur, « Decathlon nous rappelle que les clients ne sont pas tant fidèles aux programmes de fidélité qu’aux marques, aux expériences que la marque leur apporte, et aux relations d’exception que la marque construit et partage avec eux ».
Une analyse qui fait écho au thème de notre dossier de septembre dernier : Fidélité-fidélisation : le grand écart… jusqu’où ?
Repéré sur : LSA
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Fnac Darty booste les avantages de ses cartes de fidélité
Fnac Darty enrichit ses programmes de fidélité. « C’est un enjeu majeur dans la bataille qui l’oppose aux autres distributeurs, et à Amazon en particulier, dont l’abonnement Prime est un redoutable instrument de conquête de clients exclusifs et fidèles », commente Le Figaro. Pour continuer de séduire les détenteurs de cartes de fidélité de la Fnac et de Darty, le groupe propose ainsi depuis le 3 janvier des promotions à valoir auprès de 55 enseignes. Baptisée « Pass Partenaires », l’offre permet de profiter de remises allant jusqu’à 35 % chez des partenaires dans des secteurs très variés, comme Fly, Booking, Intersport, Galeries Lafayette, UberEats, Sarenza, Nature et Découvertes, etc. D’autres enseignes devraient rejoindre le dispositif dans les prochains mois.
Quels sont les vrais leviers de la fidélité ?
#Rétro2017. Les Français n’ont jamais eu autant de cartes de fidélité dans leur poche. D’après une étude BNP Paribas Personal Finance, chaque foyer en détient maintenant en moyenne 6,7, contre 4,7 en 2010. Toutes les marques ou presque proposent désormais leur carte de fidélité. Même H&M et Picard qui résistaient au phénomène ont franchi le Rubicon en 2017. Logique : ces cartes permettent à la fois de collecter des données sur la clientèle et de doper les ventes. Selon une étude d’Accenture Strategy, les membres de programmes de fidélité génèrent de 12 à 18 % de chiffre d’affaires supplémentaire par rapport aux clients traditionnels. Mais plusieurs enquêtes indiquent aussi clairement que les cartes ne créent pas de « vraie » fidélité : elles ne font que stimuler la répétition de l’acte d’achat en accordant un avantage financier. Ce comportement opportuniste prend fin quand le programme s’arrête.