Amélie Poisson, DGA de La Redoute : « Arrêtons de parler de personnalisation, pensons d’abord client et bénéfice client »

23/03/2023

Directrice générale adjointe de La Redoute en charge du commerce et du marketing, Amélie Poisson développe une approche pragmatique de la personnalisation. Elle s’incarne dans une stratégie « app first », proposant une expérience différente entre le site et l’application. Parmi les projets : toujours plus d’inspiration et un centre de préférence pour impliquer les clients.

Amélie Poisson, DGA de La Redoute

Que représente la personnalisation pour La Redoute ? En quoi est-elle un enjeu ?

Amélie Poisson : Le e-commerce, ce n’est pas qu’un produit. C’est aussi du service, que le client attend tout au long de son parcours d’achat jusqu’à la livraison. À chaque étape, nous nous demandons comment nous pouvons l’aider et lui faire gagner du temps. C’est d’autant plus important que nous nous adressons aux familles, avec une clientèle plutôt féminine. Et même si la situation s’améliore sur certains points, nos clientes restent encore très sollicitées dans l’organisation du foyer et leur charge mentale ne baisse pas véritablement. Pour être leur marque préférée, leur destination shopping préférée, nous devons rendre le e-commerce le plus facile possible, en proposant des sources d’inspiration qui leur correspondent et en leur simplifiant la vie.

Quand on se met à la place du client, on réalise que le e-commerce demande un effort. Il faut trouver le produit que l’on recherche, créer son compte, payer en ligne avec le 3D secure, se faire livrer, gérer le retour si l’article ne convient pas, etc. Sur tous ces points, nous voulons que le client se dise : « C’est facile à La Redoute ». Cela passe par la personnalisation du parcours d’achat. Si on arrive à proposer la bonne sélection, au bon moment, avec le bon service, on prend un avantage compétitif non négligeable.

Quelles formes prend cette personnalisation ?

La personnalisation est un long chemin et nous sommes sans cesse en train d’améliorer notre approche. Il y a évidemment la recommandation produits. Vous surfez sur laredoute.fr ou sur notre appli et nous vous aidons à trouver le bon produit en fonction de vos recherches et de votre parcours. Cela représente environ 10 % des achats de nos clients. C’est un chiffre d’affaires important, mais ce n’est pas distinctif. Tous les acteurs proposent la recommandation produits, même si elle est plus ou moins juste.

Il y a aussi ce que j’appellerais la contextualisation d’achat. Je connais vos habitudes de paiement et de livraison, je vais vous les pousser au bon moment pour que ces étapes aillent le plus vite possible.

Notre prochaine étape pour la personnalisation se joue sur le terrain de l’inspiration. La Redoute a l’ambition d’être une marketplace de référence, surtout en décoration et en mode. Nous ne croyons pas à l’hyperchoix mais nous avons néanmoins une offre très vaste et nous devons guider nos clients et les inspirer. Pour y arriver, nous avons choisi de miser avant tout sur notre application. Nous ne cherchons pas en effet à proposer la même expérience sur le site et sur l’application. Nous croyons à une stratégie « app first ».

Quels sont les avantages de l’application pour la personnalisation ?

Les clients y sont naturellement logués, et donc identifiés sans avoir besoin de recourir à un cookie tiers. Les clients qui ont téléchargé l’application sont aussi les plus fidèles, les plus contributifs et les moins dépendants de Google et du marketing digital puisqu’ils ont une récurrence plus grande de visites. Mais pour qu’un client garde son application en poche et revienne régulièrement, il faut lui apporter quelque chose de distinctif. Nous sommes par exemple en train de tester sur l’appli un module d’inspiration sur le principe d’un mur « Pinterest-like ». Des photos en lien avec les centres d’intérêts de nos clients pour leur faire découvrir nos produits. Par exemple, un mur La Redoute Intérieurs.

Quelle est la part des ventes réalisée par l’appli La Redoute ?

En France, nous réalisons environ 30 % de nos ventes sur l’appli. Ce qui est déjà très bien. Je pense que nous pouvons atteindre les 40 %, mais il sera difficile d’aller au-delà du fait du profil de nos clients, qui ont une représentativité générationnelle très large. 

Sur quel autre projet travaillez-vous autour de la personnalisation ?

Nous voulons allier notre connaissance data avec quelque chose auquel je crois beaucoup : un « preference center ». Nous allons impliquer nos clients et leur demander sur quoi ils veulent avoir de la personnalisation, quelles sont les marques qu’ils aiment, quelle est la composition de leur foyer… Ils répondront bien sûr s’ils le souhaitent. On verra ce qu’ils acceptent de nous dire.

Ce mix de déclaratif et d’exploitation de la data va permettre d’aller vers un dispositif de personnalisation plus pertinent. Cela se fera de façon très transparente. Nous allons expliquer à nos clients ce que nous ferons de leurs données.

Quelles sont les clés pour réussir à rendre chaque client unique ?

Avancer étape par étape et toujours penser au client. La personnalisation est un chemin dans lequel on peut se perdre. Nous avons essayé beaucoup de choses, nous avons écrit beaucoup de théories, nous avons rempli beaucoup de slides, et puis… la réalité est différente. Nous sommes passés à une approche plus pragmatique. Je dis parfois à mes équipes : « Arrêtez de parler de personnalisation. Cela ne veut rien dire en soi. Pensez d’abord client et bénéfice client ».

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