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Comment accompagner les consommateurs dans les parcours d’achat omnicanaux ?

21/01/2021

Google propose une alternative au modèle du « purchase funnel », l’entonnoir de conversion, servant à décrire les parcours d’achat. Une idée-force : ces parcours ne sont plus linéaires. Pour émerger, les marques doivent se positionner en repère et en instrument de simplification. Avec la crise sanitaire, elles choisissent aussi de réinventer l’accompagnement humain sur le digital.

Savez-vous à quelle époque remonte la modélisation du parcours d’achat sous la forme d’un tunnel ou d’un entonnoir de conversion (la partie gauche du schéma ci-dessus) ? À 1898 ! Cette année-là, Elias St. Elmo Lewis, l’un des pionniers américains de la publicité, pose les bases du « purchase funnel ». Son modèle décrit 4 étapes devant permettre de nouer une vente : attirer l’attention, susciter l’intérêt, provoquer le désir, et pousser à l’action. On parle aussi de modèle AIDA, pour Attention, Intérêt, Désir et Action.

Depuis la fin du XIXe siècle, le concept du « purchase funnel » a été maintes fois adapté et, dans ses différentes variations, il reste un outil très en vogue dans le marketing. Le concept d’entonnoir de conversion peut notamment être utilisé dans les stratégies de contenus afin de proposer aux acheteurs potentiels le bon message avec les bons arguments en fonction du parcours qu’ils ont accompli. Comme proposer un webinaire pour susciter l’attention d’une cible ou lancer une vente flash pour faire passer à l’action.

La vision de Google pour sortir d’un modèle linéaire

Google vient d’interroger cette représentation du parcours d’achat dans un article intitulé « Au revoir l’entonnoir. Décoder la prise de décision d’achat ». Aidée par des experts des sciences du comportement, l’équipe Google chargée des tendances de consommation veut porter un nouveau regard sur la façon dont les consommateurs décident quels produits ou services acheter. « Nous savons que ce qui se produit entre le facteur déclencheur et la prise de décision d’achat n’est pas linéaire, écrivent les auteurs. Nous savons qu’il existe un ensemble complexe de points de contact qui diffère d’une personne à l’autre. En revanche, nous ne savons pas vraiment comment les consommateurs traitent toutes les informations et les options qu’ils découvrent au cours du processus. » Google a baptisé « messy middle » (littéralement, le milieu désordonné) cet espace complexe entre le facteur déclencheur et l’achat (le schéma ci-dessus).

« Son design traduit les hésitations du consommateur, entre le facteur déclencheur de recherche (ex. ‘J’ai envie de m’acheter une nouvelle paire de baskets car les miennes sont trouées’ ou ‘Tiens, c’est les soldes’) et l’achat. Il vous faut parfois 17 sites, 3 comparateurs et 8 mètres de scroll pour choisir votre prochaine paire de baskets. Bienvenue dans le ‘messy middle’, illustre dans une étude dédiée à la France Baptiste Tougeron, Research Manager chez Southern Europe Google. Dans ce messy middle, le consommateur explore de nombreuses informations sur les produits et les marques, puis il évalue toutes les possibilités. »

En effet, d’après les experts de Google, tout le parcours d’achat s’articule autour de « deux modes mentaux différents » : l’exploration (une activité expansive) et l’évaluation (une activité réductrice). « Toute action d’un utilisateur peut être classée dans l’un de ces deux modes mentaux à travers une très grande variété de sources online (comme les moteurs de recherche, les réseaux sociaux, les agrégateurs et les sites web d’avis). »

La marque comme repère tout au long du parcours d’achat

Moins linéaires, omnicanaux, les parcours d’achat actuels sont une source de complexité pour les marques qui cherchent à les décrypter, mais aussi pour nombre de consommateurs qui peuvent être perdus face à la profusion d’offres sur Internet. Leur premier réflexe est d’ailleurs, d’après l’étude de Google France, de se tourner vers les avis laissés par les autres consommateurs pour se faire leur opinion.

Ces derniers mois, la crise sanitaire a accéléré la digitalisation de la consommation, soit par contrainte (fermeture des magasins physiques), soit par crainte de la contamination (lire notre article Le consommateur français, champion de l’omnicanal en Europe). Ce qui a encore compliqué la prise de décision. Rémy Oudghiri, directeur général de Sociovision, nous expliquait récemment dans une interview : « Les consommateurs ont besoin de repères dans le chaos ».

Pour ce sociologue qui identifie au sein du groupe Ifop les signaux faibles et les tendances émergentes, « au bout d’un moment, l’hyperchoix, et même cette forme de chaos qui règne sur Internet, se retourne contre lui-même. Pour se rassurer, les gens finissent par se tourner vers des acteurs qui leur sont familiers. L’ère de l’incertitude dans laquelle nous sommes installés pour longtemps fait que les consommateurs ont besoin de repères, au travers de marques qu’ils connaissent. »

Directeur Retail chez Google France, François Loviton arrive à des conclusions similaires dans CB News : « Les marques doivent se positionner en repère et en instrument de simplification tout au long du parcours d’achat. En effet, 58 % des consommateurs français interrogés dans notre étude déclarent avoir des difficultés à trouver le produit qu’ils cherchent. Dans le contexte actuel, les marques font face à un double enjeu : rassurer les clients mais aussi faire preuve d’empathie. Cela demande de reprendre la parole sur leurs valeurs et leur mission, comme l’a fait Nike par exemple. »

Réinventer l’accompagnement humain sur le digital

Malgré des interactions physiques limitées par la crise sanitaire, les marques ne veulent pas perdre le contact humain avec leur client. C’est un gage de réassurance, et la façon la plus efficace pour accompagner les clients à tout moment de leur parcours d’achat. Ainsi, à l’instar d’autres enseignes, « Sephora s’appuie sur le monde physique pour accroître la conversion online », explique Mathieu Staat, Digital and Customer marketing director de l’enseigne. Intervenant lors d’un événement organisé par la jeune société française ContentSquare et cité par La Revue du Digital, il précise : « Les équipes peuvent intervenir très en amont, en one-to-one ou en one-to-many via la mise en place de contenus accessibles à tous, de lives, que l’on peut retrouver également en différé. »

Mathieu Staat pointe notamment les bons résultats du service « Live Shopping » de l’enseigne. Autrement dit, les échanges en direct, par chat ou vidéo, entre un internaute depuis le site de l’enseigne et une vendeuse en magasin. « Nous venons de le proposer en France à partir de notre magasin de Saint-Michel à Paris. Les Beauty Advisers ont la possibilité d’accompagner les clients en ligne dans leurs achats. Vous pouvez passer d’un chat à un chat-vidéo. La conseillère vous accompagne dans le magasin dans le rayon que vous souhaitez. Elle peut même mettre les produits au panier en flashant le code-barres du produit. C’est une vente totalement assistée depuis le magasin. C’est une nouvelle façon de vendre. » Avec des résultats décrits comme « extrêmement bons ». « On construit de la fidélité avec nos clients avec ce type de services qui vont se déployer, se démultiplier dans les enseignes », ajoute le responsable marketing de Sephora.

De plus en plus de marques proposent en effet de mettre en relation les internautes avec des vendeurs en boutique. Les clients Petit Bateau peuvent par exemple eux aussi faire leur shopping en boutique sans bouger de leur canapé. À tout moment de leur parcours d’achat, soit parce qu’ils cherchent l’inspiration ou parce qu’ils hésitent avant de commander, ils peuvent réserver depuis le site de la marque un rendez-vous shopping personnalisé parmi 5 boutiques de l’enseigne (à Paris, Boulogne-Billancourt et à Rennes Centre). Un vendeur les accompagnera en visio pour leur montrer les collections du magasin et les guider dans leur achat. Si un article les intéresse, ils recevront un lien sécurisé par mail ou SMS pour valider la commande et effectuer le paiement à distance. Les achats pourront être livrés à domicile ou récupérés en click and collect. Débuté en ligne, le parcours d’achat se finit ainsi de plus en plus souvent en magasin.

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