La sobriété, un stop salutaire à nos impulsions ?

21/02/2023

Comment résoudre aujourd’hui l’équation de nos désirs de consommateurs face à notre conscience de citoyens qui questionne nos modes de vie ? Pour vivre heureux, vivons légers ! Facile à dire quand nos rites de consommation reposent sur l’opulence et le culte de l’objet. Malgré tout, la sobriété et la maîtrise de notre consommation ne pourraient-elles pas être source de satisfaction et d’apaisement ?

Une idée tapie dans l’ombre du consumérisme

À chaque époque sa façon de consommer et il ne s’agit pas de tirer à boulets rouges sur les Trente Glorieuses ni sur un passé dont l’héritage nous porte aujourd’hui préjudice. Cette période fastueuse résulte des années d’après-guerre, pendant lesquelles pénuries et privations ont affecté l’économie et traumatisé toute une société. Poussé à son paroxysme avec une vision très court-termiste, le principe de consommation massive s’est étiolé au fil du temps, critiqué notamment par le sociologue Jean Baudrillard. Dans son essai intitulé La Société de consommation, célèbre réquisitoire contre la surabondance, il pointe la contradiction entre nos instincts créatifs et nos instincts destructeurs. Cet état impulsif nous pousse à déployer des capacités de création et de production titanesques afin que les objets, une fois consommés, soient rayés de notre existence. Publié en 1970, c’est-à-dire avant le premier choc pétrolier de 1974 qui a mis un coup d’arrêt au pouvoir d’achat, le livre de Jean Baudrillard laissait supposer que cette frénésie haletante propre au consumérisme était déjà en bout de course. Nous avons laissé passer les délocalisations - massives, elles aussi - des années 1980 et maintenu tant bien que mal la progression de nos niveaux de vie avant de repenser nos modes de consommation à l’aune de l’environnement. Nous sommes en 2002, “notre maison brûle et nous regardons ailleurs”, selon la formule de Jacques Chirac qui marque encore les esprits. Depuis ? Notre angle de vue s’est resserré et nous faisons chaque jour un peu plus le constat que cette dynamique outrancière est dans une impasse. Nous voilà entrés dans l’ère de la consommation responsable.

L’économie s’organise autour de la sobriété

Comme il est difficile d’ajuster les curseurs et de faire le virage de la sobriété ! Pourtant, cette émancipation vis-à-vis des objets donne une énergie libératrice, à en croire les défricheurs de cette tendance qui ressemble plus à une nécessité qu’à un nouveau comportement d’achat venu en chasser un autre. Pour tenter d’atténuer les automatismes du système capitaliste, l’économie est devenue collaborative et circulaire mais aussi sociale et solidaire. Ce secteur économique représente 10 % du PIB et 14 % des emplois privés en France. Les entreprises de l’ESS sont aujourd’hui les plus à même de résoudre les défis de notre époque avec des objectifs fixés à moyen terme. Engagées, locales, d’utilité sociale ou environnementale, elles cohabitent avec des structures plus traditionnelles mais redessinent peu à peu le paysage de l’entrepreneuriat français, en partie parce qu’elles rencontrent une cible à l’écoute du discours qu’elles diffusent. Derrière les déclinaisons d’une économie nouvelle se cachent toutes les facettes de la sobriété. Un mode de consommation qui suppose une révolution dans nos achats compulsifs et nos désirs de propriété. Ce mot à rebours de nos usages implique davantage de responsabilité mais c’est également une façon d’entrer fièrement en résistance pour une noble cause.

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