Maud Vinet, une physicienne au cœur de la future révolution quantique

Portrait de Maud Vinet

Maud Vinet a fondé Quobly en 2022 avec un objectif : mettre rapidement sur le marché un processeur quantique opérationnel basé sur une avancée majeure, le qubit en silicium. 

Selon cette docteure en physique fondamentale, l'informatique quantique a le potentiel d'apporter une puissance de calcul sans précédent à de nombreux secteurs d’activité.

11/10/2024
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AU CŒUR DE LA MATIÈRE

Écouter Maud Vinet, c’est partir en voyage au cœur de la matière, jusqu’au niveau des atomes et des particules élémentaires. En effet, cette pionnière du calcul quantique à base de silicium, qui a déjà déposé plus de 80brevets, a lancé en 2022 Quobly, une startup de la deep tech, pour produire le premier ordinateur quantique de France. 

Les ordinateurs quantiques s’appuient sur des propriétés de la physique quantique pour effectuer des opérations, explique-t-elle. « La physique quantique, c’est la partie des sciences physiques qui décrit les propriétés des objets de très petites dimensions, comme les atomes et les particules », tandis que la physique elle-même a pour objet l’étude des propriétés générales de la matière, de l’espace et du temps. Les informations produites par ces ordinateurs sont stockées sous forme de qubits, qui sont en quelque sorte les « jumeaux quantiques » du bit, l’unité de mesure de base de l’informatique. « En accumulant les qubits, on augmente considérablement la puissance de calcul des ordinateurs et on peut résoudre des problèmes inaccessibles aux supercalculateurs actuels. » 

Les applications de ces ordinateurs d’un nouveau genre sont innombrables. « En pharmacie, ils peuvent simuler les propriétés des protéines, une opération très complexe, et accélérer la mise sur le marché de médicaments à base de protéines. Ils peuvent aussi aider à inventer des nouveaux matériaux conducteurs d’électricité sans dissipation de l’énergie, ou à améliorer l’aérodynamisme des avions en calculant les écoulements d’air, qui répondent à des systèmes d’équations d’une grande complexité. Ils apportent des solutions plus efficaces aux calculs d’optimisation, qu’il s’agisse d’un livreur qui construit sa tournée ou d’EDF qui gère son réseau de distribution d’énergie. »

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UNE INDUSTRIE QUI SE CONSTRUIT

L’ordinateur quantique n’existe pas encore, mais Quobly a déjà mis au point une « preuve de concept ». « Ce sont de petits ordinateurs aux applications très spécifiques, qui démontrent qu’ils peuvent être la source d’un écosystème autour du quantique. Il reste encore à développer les couches logicielles et les interfaces utilisateurs pour exploiter toute leur puissance de calcul. »

« Dans une deep tech, le rôle du pdg est plus technique que dans une entreprise classique », précise Maud Vinet qui consacre une bonne moitié de son temps à résoudre des questions techniques. L’autre moitié, elle la passe à lever des fonds et à nouer des partenariats avec des industriels pour lancer la fabrication de machines qui correspondent aux besoins de ses clients potentiels. En 2023, Quobly a ainsi pu lever une vingtaine de millions d’euros auprès de capitaux risqueurs. 

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RENDEZ-VOUS EN 2027 POUR LES PREMIERS ORDINATEURS

Quobly est aussi très enracinée dans l’écosystème de startups grenobloise. Elle multiplie les collaborations avec des partenaires publics, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et le CNRS, et privés, comme Orano, qui aide à produire le silicium nécessaire aux microprocesseurs, Air Liquide pour faire passer le silicium à l’état gazeux, Global Foundries, un producteur de microprocesseurs, ou encore OVHcloud : « La puissance de l’ordinateur quantique sera accessible via le cloud, elle sera transparente pour les utilisateurs. » L’entreprise fait par ailleurs partie d’une cohorte de cinq startups financées par le ministère des Armées, qui veut doter la France d’un ordinateur quantique.

2027 : c’est l’horizon auquel Maud Vinet prévoit de vendre ses premières produits, mais pour les fabriquer, pas question de construire une usine ex nihilo. « Les usines qui produisent des microprocesseurs sont très gourmandes en eau et en énergie », insiste cette écologiste convaincue, très engagée dans la promotion de l’entrepreneuriat grenoblois. « Quobly est une startup fabless, sans usine, et nous allons plutôt recourir aux usines de semi-conducteurs qui existent déjà. » 

Parcours

Maud Vinet en cinq dates

1994 : Arrivée à Grenoble

2005 : Naissance de son premier enfant

2009 : Départ aux États-Unis pour travailler chez IBM

2022 : Lancement de Quobly

2023 : Levées de fonds de 19 et 2,5 millions d’euros.

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