Logistique : comment Le Temps des Cerises gère retours et délais pour grandir en Europe ?

10/09/2025

Délais de livraison différents selon les pays, retours deux fois plus élevés sur les marketplaces, standards imposés par certains transporteurs : Le Temps des Cerises ajuste en permanence son organisation. Entre assortiments adaptés, partenaires choisis au cas par cas et vigilance environnementale, la marque de jeans française construit une logistique sur mesure pour soutenir sa croissance européenne. Les explications d’Astier Verschuere, directeur digital et e-commerce de la marque.

Quels sont les principaux obstacles logistiques lorsqu’on passe d’un modèle national à une ambition européenne ? Comment abordez-vous les différences de saisonnalité et de rythme des collections ?

Astier Verschuere – Le marché français ayant atteint une certaine maturité, l’Europe est apparue comme la première zone de conquête. Nous avons construit une logistique fiable avec Colissimo, malgré quelques spécificités locales : attentes différentes sur les frais et délais de livraison, contraintes douanières en Suisse ou au Royaume-Uni. Des benchmarks ont permis d’adapter la politique commerciale. Concernant la saisonnalité, l’organisation été scindée en trois pôles : une équipe en France, une pour l’Allemagne et une troisième pour le reste de l’Europe. Cela permet d’ajuster les messages, les soldes et les temps forts commerciaux selon les marchés. Ce choix stratégique s’inscrit dans un mouvement plus large : 83 % des PME françaises privilégient déjà l’Union européenne comme première destination export, et 26 % envisagent d’exporter en 2025 (Bpifrance).

 

Vous combinez site marchand et marketplaces locales comme Zalando. Quelles conséquences ce choix a-t-il sur la gestion des flux, des stocks et des retours ? 

A. V. – C’est un axe stratégique. Les marketplaces sont à la fois un canal de vente complémentaire et un formidable accélérateur de notoriété locale. En Allemagne par exemple, nous travaillons avec Zalando, AboutYou, Otto… Mais cela implique d’adapter notre gestion car les retours sont très élevés, particulièrement dans le textile féminin, un comportement favorisé par des marketplaces qui ont appliqué une politique de retour sous cent jours et des process simplifiés. Résultat : le taux de retour est deux fois supérieur à celui enregistré sur notre site. Pour y répondre, nous avons ajusté notre assortiment : retrait des petits prix, valorisation de produits dont la marge couvre les frais de livraison et de retour. 

 

Le choix du transporteur devient un critère de référencement dans certains pays. Comment gérez-vous les standards locaux ?

A. V. – Jusqu’à récemment, Colissimo assurait l’essentiel de nos envois, en s’appuyant sur le réseau européen de DPD. Mais certaines marketplaces, comme Zalando, imposent désormais leurs propres standards logistiques, de plus en plus stricts. Résultat : nous devons adapter notre choix de transporteurs pays par pays, selon les exigences locales et les attentes des clients. En Allemagne, par exemple, nous avons basculé sur DHL, qui livre aussi le samedi. Sur notre site en propre, en revanche, les clients ne manifestent pas de préférence particulière pour un transporteur. 

 

Comment conciliez-vous exigence locale (choix du transporteur, points de retrait…) et ambitions RSE, notamment en matière de livraisons à faible impact ? 

A. V. – L’équation logistique se joue entre efficacité et impact environnemental. Nous suivons de près les initiatives de nos partenaires. Par exemple, le service Colissimo de retour en boîte aux lettres, intégré à la tournée du facteur, permet de réduire l’empreinte carbone. Ce type d’innovation montre qu’il est possible de concilier praticité et durabilité. Nous privilégions donc les transporteurs capables d’apporter cette valeur ajoutée écologique, sans compromis sur la qualité du service.

 

Au-delà de la livraison, comment les enjeux RSE influencent-ils aujourd’hui vos décisions commerciales ?

A. V. – La marque n’est pas militante mais refuse le greenwashing : l’objectif est de faire ce qui est annoncé, sans en rajouter. Trois axes guident cette approche. D’abord, la durabilité du produit : un jean conçu pour durer 5 ans n’a pas à être remplacé chaque saison. Ensuite, l’optimisation du stock : l’ensemble de l’inventaire est centralisé afin d’éviter la surproduction et limiter le risque de destruction ; pour réduire le risque d’invendus, entrepôts, magasins et e-commerce sont mutualisés. Enfin, la livraison et la gestion des retours : une déclaration en ligne est privilégiée pour collecter des données et améliorer les produits. L’action se concentre ainsi sur le fond, même si ce n’est pas toujours l’argument numéro un pour le client. 

La Bio de Astier Verschuere

Astier Verschuere est directeur digital et e-commerce de la marque depuis sept ans. Spécialiste de la transformation numérique des marques, il a travaillé chez Arvato Services où il a développé des offres CRM et e-commerce mêlant innovation et performance marketing. Il rejoint ensuite, en tant que directeur Produit, Easyware, un éditeur CRM, puis Le Temps des Cerises pour piloter sa stratégie omnicanale, moderniser la plateforme web et renforcer les outils de relation client. Son approche croise expérience utilisateur, data et optimisation des parcours d’achat.

 

Crédit photo couverture : ©Adobe Stock

La Bio de Astier Verschuere

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